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HF

Pendant de nombreuses années HF, pour la communauté aéronautique, a eu le sens de Hautes Fréquences (High Frequency), en référence aux communications radio… Celles-ci avaient commencé en code morse, et, avec la mise en œuvre des communications en phonie, le métier de radio-navigant a connu le chant du cygne.

 
 
     
Installations HF du Superconstellation (Antennes extérieures et poste de radionavigant)
 
    1 - Amplificateur du Haut-Parleur
4 - Boîte de jonction
5 - Boîte de sélection Radio
6 - Récepteur HF N° 3 (BC-348)
7 - Panneau de commande de l'émetteur HF
8 - Manipulateur Morse
13 - Récepteur HF N° 1 (BC-348)
16 - Émetteur HF N° 1 (T47/ART-13)
18 - Boîte d'accord antenne
     
Puis sont venues les communications en VHF, de très bonne qualité d’écoute, rendues possibles grâce à un réseau d’antennes au sol. De sorte que les communications HF se sont restreintes aux parcours océaniques et désertiques. Pour autant elles ont perduré et « passer en HF » signifiait pour le pilote une dégradation des communications : Celles-ci sont très parasitées, la compréhension en est rendue difficile et parfois impossible, la fréquence utile est dépendante des effets atmosphériques, elle est différente selon que l’on vole de jour ou de nuit, la propagation peut être impossible sur une période allant jusqu’à une ou deux heures sous les latitudes polaires, et en tout état de cause, avec l’augmentation du trafic et l’utilisation d’une fréquence commune (par exemple tous les avions Européens sont sur la même famille de fréquences lors d’une traversée de l’Atlantique Nord), la fréquence est saturée ce qui provoque de nombreuses interruptions ou interférences dans communications (la discipline et le grand principe « écouter avant d’émettre » étant de moins en moins respecté, signe d’incivisme propre à notre époque). Autant dire que « passer en HF » a la connotation de corvée. Aujourd’hui la généralisation des communications entre pilotes et contrôleurs par liaisons de données (CPDLC : Controller Pilot Datalink Communication) et l’utilisation des réseaux satellites permet de cantonner les communications HF au « plan B », c’est-à-dire aux cas où le CPDLC ne fonctionne pas ou plus. On a muté vers une communication écrite, moins ambiguë (mais comme pour tout système, pas à l’abri d’erreurs, d’adressage en particulier), plus fiable dans les transmissions, une espèce de SMS ou d’email.

Mais au fil des années, HF a pris le sens de « human factors », FH en français, Facteurs Humains.

Grande question.

Il faut parler ici des enquêtes sur les accidents d’avion. L’analyse résultant de ces accidents a trouvé ses limites dans le simple constat des causes humaines associées aux accidents.
Un immense travail de recherche a été entrepris, impliquant tout le système et faisant appel aux psychologues comportementalistes ou cogniticiens. L’ambition était grande : Expliquer les erreurs humaines, et les situer dans la logique du système, ce qui amenait à rechercher les facteurs déclenchants de l’erreur humaine, non seulement au niveau des acteurs de première ligne (les pilotes principalement) mais dans l’organisation même, concernant la réglementation, la gestion des ressources des compagnies, la formation, la conception des avions, leur ergonomie, leur entretien etc.
     
     
Expliquer les erreurs mais aussi analyser en quoi les protections inhérentes au système ont dysfonctionné. La plus belle conceptualisation de ce modèle a été faite par James Reason :
     
Le modèle de Reason
     
Le débat sur les facteurs humains est passionnant et souvent passionné. Que faire pour éviter l’erreur humaine ? Mettre plus d’automates, supprimer l’opérateur humain (robotiser), piloter depuis le sol (drôner) etc.

Il est évident que quelque soient l’approche et la solution retenues on ne fait au mieux que progresser, mais sans éradiquer l’erreur humaine, ou alors on déplace la menace.

Il y a, à regarder le système avec le recul nécessaire, cent pour cent de facteurs humains :
     
     
De mon point de vue, il manque à ce graphe/camembert ci-dessus, le facteur humain au niveau de l’autorité, qu’elle soit de tutelle ou règlementaire, et au niveau des managers des entreprises qui ont leur propre appréciation du risque et qui décident des ressources.

La généralisation de l’automatisation sophistiquée (et évident facteur de progrès, statistiquement parlant) a montré ses limites : Hypovigilance à surveiller des systèmes fonctionnant (trop) bien, perte de savoir-faire basique et incompétence à reprendre la main avec les seuls fondamentaux du pilotage, voire mutation sociologique de la population des pilotes. Lorsque survient l’accident moderne qui révèle et diabolise l’erreur humaine, l’incompréhension et la frustration est immense face à l’accident évitable. Aucune réparation matérielle ne viendra gommer ceci ni effacer le dommage immatériel.

Un avion sans pilote serait évidemment déplacer le facteur humain vers le sol, sans l’éliminer. Le pilote avant tout est l’otage de ses propres faits et décisions et il y a un adage un peu lourdaud mais qui illustre parfaitement le propos : « En général, le pilote est le premier à arriver sur les lieux de l’accident ».

L’évocation FH a une connotation négative. On oublie toujours que l’être humain est supérieur au robot (à l’ordinateur) dans sa capacité à s’adapter face à une situation imprévue, non programmée dans les ordinateurs car non envisagée ou statistiquement peu probable. Tout le système aéronautique et son économie est basée sur cela. Et il y a quelques exemples magnifiques ou l’homme a fait face à cet imprévu catastrophique.
     
     
Ainsi ces équipages privés de commande de vol, et réussissant à contrôler tant bien que mal, pour le meilleur et pour le pire, leur avion, grâce à leur connaissance profonde du vol. J’évoque ici le B747 des Japan Airlines, en perdition mais piloté sans commandes de vol pendant près d’une heure, le DC10 des United Airlines, que son équipage parvint à ramener sur une piste et ainsi sauver la moitié des occupants qui eurent été condamnés à une mort certaine si le génie l’homme n’avait pas pris l’ascendant sur la technique, ou enfin cet Airbus A300 de DHL atteint par un missile, perdant les commandes de vol, et pour autant ramené sur la piste de Bagdad par son commandant de bord.

Le facteur humain, avéré lors d’un crash, c’est bien le meilleur et le pire de l’homme.

Le pire est arrivé avec l’accident des Germanwings.
     
 
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